Que regarder quand on achète une tablette de chocolat ?

C’est une excellente question que j’ai reçue de Marie et dont la réponse n’est pas si évidente que ça. Comment lit-on une tablette ? Quels sont les ingrédients à rechercher ou à éviter comme la grippe en hiver ?

Voici la réponse longue pour les plus intrépides d’entre vous, et un récapitulé au début pour les plus pressé-es. Accrochez vos ceintures ; nous allons visiter les différents ingrédients qui peuvent se retrouver dans une tablette de chocolat : cacao, beurre de cacao, sucre, poudre de lait, arômes et lécithine. (Temps de lecture: 10 min)

En résumé 

Et pour faire vite, voici les ingrédients habituellement présents et auxquels porter attention :

Ingrédients 🤩 🙄
Origine des fèvesRégion, plantation, ferme, coopérative mentionnéeJuste noté fèves / pâte de cacao sans origine, ou le pays d’origine sans plus de détails
Beurre de cacaoBeurre de cacao uniquement
Matières grasses végétales (huile de palme, …)
SucreSucre comme 2e, 3e ingrédient ou plusSucre comme 1er ingrédient
Poudre de laitPoudre de lait, vegan ou pas (si chocolat au lait)
ArômesVanille, ou quand la tablette spécifiquement infusée, d’autres arômes naturels mentionnés (lavande, menthe, etc)Vanilline, « arômes » sans plus de précisions
LécithineRien ou lécithine de tournesolLécithine de soja (E322)
  1. La fève sous toutes ses formes : Retrouvez l’origine

Quand on achète une tablette de chocolat, on veut le goût du chocolat, a minima. Comme vous l’aurez lu ailleurs sur ce site, le chocolat peut contenir plein de saveurs différentes. Olive, noix, framboises : c’est comme le vin, comme le café de spécialité, comme le fromage belge, il y a un peu de tout. Plus de 800 composés aromatiques, c’est dire. 

Mais en terme d’achat, comment vérifier ce que contiendra la tablette ? Pour commencer, on peut retrouver 2 expressions : 

  • Pâte de cacao : aussi appelé « liqueur de cacao » ou « masse de cacao », c’est la fève de cacao qui a été torréfiée, dont la coque a été retirée et qui a été broyée. Il s’agit donc d’une masse +/- granuleuse non sucrée. Malheureusement, cela n’indique pas spécifiquement s’il s’agit d’un chocolat artisanal ou industriel, goûtu ou pas.
  • Fèves de cacao (ou grué) : c’est l’indication que vous trouverez dans le chocolat artisanal. On part de la fève et on fait du chocolat (c’est un brin plus compliqué que cela, mais vous voyez le principe). Habituellement, c’est un signe que le chocolat a été fabriqué par la firme elle-même. Ex: photo Mathieu Taborcia ci-joint.

OK, c’est déjà ça, mais comment savoir quelle est la qualité de ce chocolat, tant gustative qu’éthique ? 

Une bonne base est de vérifier si le nom du fermier-e, la coopérative, la région ou du pays est mentionné sur la tablette. 

  • Pas d’origine des fèves du tout : S’il n’y a rien de noté – coucou Côte d’Or et Callebaut noir de noir -, cela veut dire que vous ne pouvez pas retracer (et probablement l’industriel derrière non plus, d’ailleurs) d’où viennent les fèves. Cela veut dire aussi pas d’informations sur la cultivation de ces fèves, sur les conditions de travail, etc. Bref, côté éthique, on ira voir ailleurs.
  • Le pays de production des fèves est noté : C’est déjà un peu mieux au niveau traçabilité, mais cela n’est pas un gage de qualité. Car aujourd’hui, même les grosses firmes donnent le nom du pays pour faire plus « luxueux ».
    • « Ohh, cela vient de Madagascar ! »
    • Vous, en pensées : “Madagascar, 24 millions d’habitants, qui a bien pu produire ça ?” Le nom du pays ne veut pas dire que les fermièr-es à l’origine sont mieux payé-es, que les fèves sont tracées jusqu’à la coopérative, etc. Ce sont souvent des fèves achetées à des grands torréfacteurs (Callebaut, etc.).
  • La région, les fermièr-es, la coopérative, ferme, sont noté-es : C’est LA chose à trouver. Et ce n’est pas uniquement les chocolats artisanaux, bean-to-bar qui le notent (ex: Elsa, photo ci-jointe). Regardez Ethiquable, disponible en grandes surfaces, par exemple.

Si vous cherchez quelque chose de gustativement intéressant, qui va faire frémir vos papilles, il vaut mieux un produit fait à base de fèves de spécialité, càd du cacao qui possède des saveurs de noix, fruits, fleurs, etc. Et qui les utilisera, ces fèves plus chères ? Habituellement les faiseurs et faiseuses de chocolat artisanal ou de spécialité. Qui le noteront sur leur paquet. CQFD. Pratique, non ?

Et qu’en est-il des labels que l’on peut retrouver sur les paquets: biologique, fairtrade, etc. » hein Céline ?

Cela mérite un autre article, à moins que vous ayez envie de passer toute votre soirée sur cet article. Une chose que je peux déjà mentionner: les certifications volontaires créées par les entreprises pour elles-mêmes (ex: Callebaut Cocoa Life, Nestlé Cocoa Plan, Lindt & Sprungli Farming Program) sont à prendre avec beaucoup (et là je dis beaucoup) de pincettes. Vous vous taperiez vous-mêmes sur les doigts, vous ?   

2. Le gras, c’est la vie : le beurre de cacao

Avant, dans un temps lointain très lointain, nous utilisions uniquement du beurre de cacao dans le chocolat en Belgique. C’est-à-dire, la matière grasse contenue dans la fève de cacao (approx. 50% du contenu d’une fève, le reste étant la matière sèche de cacao – la poudre que nous mettons dans nos chocolats chauds et cakes). Le beurre de cacao est du gras fantastique : il fond à température du corps, il contient plein de bonnes choses, et quand il n’a pas été désodorisé, il possède des arômes de la fève. Le bonheur, quoi.

Puis les Anglais ont débarqué avec leur volonté de ‘Cadburiser’ l’industrie et on demandé à l’Union européenne le droit d’appeler « chocolat » un chocolat avec un % de matières grasses végétales autres que le beurre de cacao. Et ils ont gagné. Depuis 2000, le chocolat peut donc contenir jusqu’à 5% de matières grasses végétales (huile de palme par ex.)

Puis les Anglais ont osé quitté l’UE, en nous laissant cela comme héritage. Franchement. 

Donc, quand vous regardez les ingrédients : 

  • Beurre de cacao : Ok. Dans le cas du chocolat blanc artisanal, cela peut même monter à 40-50% de la tablette. Et c’est délicieux.  
  • Matières grasses végétales : Meh, comme disent les Anglais. C’est légal, mais point de vue goût (et santé), on a vu mieux. 

3. Sucre : un peu mais pas de trop

Selon cette même directive européenne, il faut du sucre pour pouvoir légalement appeler le chocolat « Chocolat ». Donc le chocolat 100% n’est légalement pas du chocolat. Voilà pour les puristes. 

Quel sucre et combien?  Vous pouvez retrouver de tout dans du chocolat : sucre de canne, sucre de betterave, sucre de fleur de coco, cassonade, panela, etc. Là, je m’en remets à votre goût. 

La question est davantage celle du % : si c’est noté comme le premier ingrédient de la liste, je me méfierais. Le sucre est moins cher que le cacao et que le beurre de cacao – encore plus de nos jours – donc c’est efficace commercialement parlant d’en rajouter davantage. Puis cela nous rend davantage accros, surtout quand vous avez la parfaite balance gras/sucre/sel (c’est le point de félicité, qui nous fait manger sans compter sur la satiété pour nous arrêter). Je ferai donc attention à ce que le sucre ne soit pas le premier ingrédient, même dans le chocolat blanc, voir ci-dessus. 

4. Les ajouts d’arômes : seulement si nécessaire

Dans de nombreuses tablettes industrielles, vous verrez un ajout d’arômes. À éviter tout de suite: quand il est mis « arômes » et rien de plus. Manque de transparence, à nouveau, et probablement quelque chose dont votre corps se passe très bien, merci pour lui. 

Les arômes peuvent être utilisés à bon escient : par exemple, un rajout de vanille (quand il joue le rôle d’exhausteur de goût, càd mettre en avant le reste du chocolat; ou dans un bon chocolat au lait/blanc) – ou de lavande/café/choisir votre saveur préférée – quand il est mentionné que c’est une tablette aromatisée. Mais ils peuvent tout autant être mis pour cacher des défauts des fèves. La vanille peut ainsi servir de cache-misère pour des fèves pourries (sur ce, bon appétit).

Le souci apparaît quand on rajoute des arômes artificiels : vanilline par exemple. Pour repérer les aliments ultra-transformés, on suggère de rejeter tout ce que votre grand-mère ou grand-père ne reconnaîtrait pas – sauf si c’est des ingrédients naturels étrangers, bien entendu. C’est un bon conseil. Surtout quand on sait qu’il suffit de 2 ingrédients – des fèves de cacao et de sucre  – pour produire un chocolat noir 70%.

5. Lécithine : le débat

Pas facile de traiter ce point-là ; les regards sont hostiles de chaque côté, les couteaux sont tirés en une attente fébrile, une petite musique de western s’invite…

La lécithine a des côtés positifs: elle facilite la fabrication de chocolat en jouant sur la viscosité et la texture. Cela permet d’ajouter moins de beurre de cacao (gain d’argent), de faciliter la production (idem), stabiliser le produit sur la durée, faciliter la sensation en bouche… C’est donc souvent utilisé dans les chocolats industriels. 

Maiiiis comme rien n’est jamais simple, certains faiseurs et faiseuses de chocolat artisanal en utilisent également. Ils utilisent alors la moins transformée des lécithines: celle de tournesol, afin d’éviter le souci de la lécithine de soja OGM. 

Côté santé, des études montrent même que la lécithine de tournesol peut être bénéfique. Alors pour ou contre? Je vous laisse choisir. 

6. Un plaisir lacté : chocolat au lait

Ici, c’est assez simple. Si vous avez envie de vous offrir un chocolat au lait, vous aurez de la poudre de lait  de vache en plus. Par contre, parfois vous aurez cet ingrédient dans une tablette de chocolat noir (re-coucou Côte d’or Noir de Noir) ; toujours bon à savoir quand vous êtes allergique au lactose. 

Certain-es notent l’origine de leur lait de vache. Mais soyons honnêtes: c’est très, très rare, même dans le chocolat artisanal/de spécialité. 

Les vegans ou allergiques au lait ne sont pas oubliés : de plus en plus de tablettes sont faites à base de lait d’avoine, d’amande, des farines, etc. Intéressantes et parfois très originales. 

7. Le pays de production du chocolat : belge ne veut pas dire qualité

On est dans le pays de production du meilleur chocolat du monde, non ? Donc il suffit de regarder si le chocolat est fabriqué en Royaume de Belgique ? 

Désolée de démolir nos croyances nationales, mais non.

Au fond, qu’est-ce que cela veut dire, le chocolat belge ? Simplement qu’il est produit sur le territoire belge. Eh oui, c’est tout. Au 19e et début du 20e siècle, nous avions en effet fait des avancées au niveau de la production du chocolat et la création des pralines, du ballotin, du transport du chocolat liquide… Mais c’était il y a longtemps. Le chocolat belge est surtout une belle opération marketing.

Notre chocolat industriel reste parfois plus savoureux que le chocolat industriel d’autres pays, je vous l’accorde, entre autres de par l’emploi du beurre de cacao. Mais cela ne veut pas dire qu’il est 1) éthique ; 2) fantastique au niveau gustatif. Pour cela, j’en reviens aux points précédents. 

Si la juste répartition des ressources vous tient à coeur, vous pouvez privilégier les chocolats faits en pays de production de cacao. Cela permet à la valeur ajoutée de rester dans le pays. Economiquement et socialement parlant, cela fait beaucoup sens. Et ils sont de plus en plus nombreux à être disponibles en Occident. (Cf. Liste des magasins).  

Si vous avez des questions, des remarques, des suggestions, n’hésitez pas à me les envoyer. Sur ce, dégustons une bonne tablette.

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